Et, action !

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Le Design au Cinéma

 

Indéniablement, cette période de confinement nous offre une jolie chose, devenue rare dans un quotidien au rythme soutenu, du temps ! L’occasion alors de se replonger sans culpabilité dans le 7ème art. Vieux films de la Nouvelle Vague, comédie ou satire des années 70, épopée futuriste des années 2000 ou blockbusters contemporains, tous ont un point commun : un décor qui permet de voir plus loin que les quatre murs de notre maison, et de s’évader.

Le cinéma est un terrain de liberté fou, on invente, on expérimente, on compose ! C’est aussi un terrain de créativité. Des années 20 à aujourd’hui, les décors ont pour mission de nous captiver, de nous inspirer ! Le mobilier tient alors un rôle de premier plan. Les objets peuvent produire eux-mêmes de l’action, ils peuvent ajouter du sens à l’intrigue, devenant un véritable personnage à part entière. Les relations sont alors à double-sens, le cinéma ayant besoin du design pour le décor, et le design s’inspirant parfois du cinéma pour raconter une histoire. Et quand les deux disciplines se conjuguent parfaitement, cela donne des films ou des meubles d’anthologie.

« L’inhumaine », Marcel L’Herbier, 1924

Mobilier, Robert Mallet Stevens

Il est une figure incontournable du cinéma français, et pourtant, une grande part de son œuvre reste méconnue. Dans les années 20, Marcel L’Herbier tourne L’inhumaine, un drame au style novateur, tant dans sa narration que dans sa forme ! Mieux qu’un film, c’est l’incarnation de l’avant-garde qui caractérise ces années, un miroir du modernisme qui agite la société. Des décors cubistes à la symétrie étourdissante signés par de grands noms de l’époque tels que Robert Mallets-Stevens – militant de la modernité et premier décorateur attitré du cinéma – ou encore Pierre Chareau.

« Je préfère montrer mes inventions aux foules du cinéma qu’aux seuls amis et maîtresses du club qui aurait recours à mes offices ». (Robert Mallets-Stevens)

« Mélodie en sous-sol », Henri Verneuil, 1963

Céramique « Femme aux Nichons », Georges Jouve

Ce polar magistral associe deux générations, en mettant en scène un vieux truand joué par Jean Gabin, et un jeune au physique presque insolent, incarné par Alain Delon. Implacable leçon d’écriture, tant le récit est haletant et la mise en scène millimétrée. Ce film nous donne aussi à voir – à travers son décor précisément pensé – une certaine conception de la vie et de la société, mettant en parallèle des nantis évoluant dans un chic très sixties, et des bandits n’ayant qu’une seule envie, les voler.

Courtesy Galerie Downtown – François Laffanour

« Mon Oncle », Jacques Tati, 1958

Fauteuils « Scoubidous », Pierre Guariche, Michel Mortier et Joseph Motte (Atelier de Recherche Plastique); Ensemble de mobilier, Jacques Lagrange

Cette œuvre majeure fut en quelque sorte le « manifeste » du film-design, puisque le mobilier fut inventé pour le film, par le cinéaste Jacques Tati lui-même, en collaboration avec Jacques Lagrange, édité ensuite en 2005 par Domeau & Pérès, tant il est devenu culte. Il convient de noter toutefois l’apparition de quelques invités de taille dans le décor, tels que les fauteuils Scoubidous de Pierre Guariche, Michel Mortier et Joseph Motte (Atelier de Recherche Plastique), les appliques de Serge Mouille et les céramiques de Pol Chambost. « Comme c’est original ! On peut s’assoir ? » clame la voisine venue admirer la résidence de l’héroïne.

« La Piscine », Jacques Deray, 1969

Ensemble de mobilier, Gae Aulenti

Le casting de ce film est déjà une promesse en soit : Maurice Ronet, Alain Delon, Romy Schneider et Jane Birkin, mis en scène ans un huis-clos estival. Le synopsis est simple : Les vacances d’un couple dans une superbe villa dans les hauteurs de Saint Tropez sont perturbées par l’arrivée d’amis, entrainant le trouble sur la nature de leur relation passées… La Piscine fait partie de ses films que l’on peut voir un nombre incalculable de fois, pour la beauté magnétique de ses acteurs, mais aussi sa sensualité esthétique qui se dégage de l’image. Tout invite au délassement : un immense transat signé Roger Tallon, ou encore un salon de jardin Locus Solus jaune de Gae Aulenti, mais le mobilier participe aussi à l’action, la piscine devenant « fatale » !

« Un décor est un grand sentiment dramatique ! » (Louis Jouvet, réalisateur)

« Oscar », Edouard Molinaro, 1967

Fauteuil « Mushroom » et son ottoman, Pierre Paulin

Entre nouvelle vague et culture pop, les années 60 vont offrir aux téléspectateurs un ciné-design prolifique. Dans Oscar, les Mushrooms de Pierre Paulin illustrent parfaitement l’idée que le public se fait d’une existence « moderne », et de la notion d’originalité et de nouveauté au sein des classes plus aisées. L’appartement de Louis de Funès devient le parfait showroom de ce qu’il se fait de mieux dans les sixties ! Conçu en 1967 par Georges Wakhevitch et Jean Forestier, les décors d’Oscar sont une mine de design contemporain.

Courtesy Galerie Downtown – François Laffanour

« 2001: A Space Odyssey », Stanley Kubrick, 1968

Ensemble de fauteuils et canapés « Djinn », Olivier Mourgue

Stanley Kubrick a compris très tôt l’importance du décor, et s’est particulièrement attaché aux choix des pièces de mobilier. Il puise dans les collections avant-gardistes et futuristes des années 60 pour présenter des pièces de design des grands noms de l’époque. Pour le film 2001, l’Odyssée de l’Espace, il réunit pas moins de 35 décorateurs ! Le célèbre lounge blanc du vaisseau spatial V est meublé de sièges rouges ondulants, de la série « Djinn », dessinée par le designer français Olivier Mourgue et éditée par la société Airborne International. Le rouge franc tranche alors impeccablement avec le blanc stellaire du décor. Au milieu, des tables à un pied, aujourd’hui iconiques : les fameuses Tulip créées par Eero Saarinen en 1956 et éditées par Knoll. Un an plus tôt, dans Casino Royale, Peter Sellers faisait des exercices de gym sur la chaise longue du même modèle, habillé de rose pour l’occasion, selon les desideratas d’Ursula Undress.

« Space 1999 », G. & A. Anderson, 1975-1977

Fauteuil “Elda”, Joe Colombo

Création emblématique de Joe Colombo, le fauteuil Elda (nommé en hommage à sa femme) présente une silhouette révolutionnaire, à la fois confortable et innovante en termes de matériaux. Sa forme avant-gardiste surprenante lui vaut un succès cinématographique certain, notamment dans la série Space 1999, ou encore dans le film Hibernatus d’Edouard Molinaro (1969), ci-dessous. Plus récemment, il sera également la star de la saga Hunger Games (2012), preuve de son intemporalité.

Courtesy Galerie Downtown – François Laffanour

« Surviving Picasso », James Ivory, 1996

Chaise « Standard » et fauteuil « Visiteur » à lattes, Jean Prouvé
Lampadaire, Serge Mouille
Chaise longue, Le Corbusier, Jeanneret, Perriand

Ce film mythique raconte l’histoire fusionnelle et passionnelle entre Pablo Picasso et Françoise Gilot, de 1944 à 1953. Tout commence peu avant la seconde guerre mondiale, sous les toits de Paris, quand Picasso reçoit la visite de deux jeunes et jolies étudiantes en art. L’une d’elle se laisse alors séduire par le grand génie. Nombreux sont les biopics dédiés au peintre, mais celui-ci aura le mérite de consacrer une grande place au décor d’intérieur. Les citations du design de cette époque d’après-guerre sont nombreuses : des chaises Standard et des fauteuils Visiteurs de Jean Prouvé, des luminaires de Serge Mouille et autre pièces majeures de cette période. Il est intéressant de noter que la famille refusa de prêter des originaux de l’artiste pour le tournage, du fait de l’interprétation trop libre des mœurs de l’artiste, le réalisateur fut donc contraint donc commander de nombreuses copies pour le film.

Courtesy Galerie Downtown – François Laffanour
Courtesy Galerie Downtown – François Laffanour

« American Psycho », Mary Harron (2000)

Fauteuil et ottoman « Barcelona », Mies Van der Rohe
Chaise, Charles Rennie Makintosh
Table basse, Paola Piva

La palme d’or de la présence à l’écran revient sans aucun doute au modèle Barcelona de Mies Van der Rohe. Mis en scène dans l’appartement glacial du golden boy et héros incarné par un Christian Bale démoniaque dans American Psycho, l’ensemble participe fortement à l’atmosphère anxiogène du film, la pièce déjà très minimaliste se transformant en véritable bloc opératoire pour les scènes de crime. Ce modèle sera ensuite utilisé dans de nombreux décors de bureaux, semblant asseoir la légitimité de son propriétaire, puisque, le mobilier est aussi moyen de confirmer le statut social. Il sera également visible dans le film Casino Royale de Martin Campbell en 2006 (ci-dessous).

« A Single Man », Tom Ford, 2009

Chaise « Standard » démontable, Jean Prouvé
Lampe à poser, Serge Mouille

Les villas dessinées par l’architecte américain John Lautner (1911-1994) sont un classique du cinéma, un véritable fantasme sur grand écran. Ce sont bien plus que de simples décors de film. Elles accompagnent l’intrigue, donnant du sens et de la profondeur au quotidien des protagonistes. La Shaffer House, construite en 1949, n’y fait pas exception. En plein cœur de la montagne, sous un chêne majestueux essentiel à l’intrigue, elle accompagne la tragédie vécue par le personnage principal. Appelée « maison de verre » par ses occupants fictifs, elle est meublée très simplement de créations des années 1960, telles que des chaises Standard démontables de Jean Prouvé ou des luminaires de Serge Mouille. Pour l’occasion, Tom Ford a même bénéficié de conseils d’expert en mobilier d’après-guerre.

Courtesy Galerie Downtown – François Laffanour

« Le Loup de Wall Street », Martin Scorsese, 2013

Fauteuil « Wassily », Marcel Breuer

Adapté de l’ouvrage de Jordan Belfort, Le Loup de Wall Street raconte l’ascension puis la descente aux enfers de l’un des plus grands courtiers en bourse de la fin des années 80. L’intrigue nous entraine dans une succession de scènes délirantes aux protagonistes accros à l’argent et au sexe. Le spectateur entre alors dans un univers peu connu, et le décor est essentiel : entre penthouse newyorkais, villas et yacht, tout est fait pour accentuer le faste et l’absurde des vies qui s’y déroulent. Une scène mémorable, entre le personnage principal et un banquier suisse (Jean Dujardin) met en avant un ensemble phare du design des années 1925-1926 : les fauteuils Wassily de Marcel Breuer.

« Alien : Covenant », Ridley Scott, 2017

Fauteuil, Carlo Bugatti

Ridley Scott, réalisateur américain contemporain, est – entre autres – réputé pour la qualité de ses décors et son incroyable application à envelopper le spectateur dans une expérience cinématographie « globale ». Ici, dans une maison posée au beau milieu d’un lac, Michel Fassenberg trône sur un siège de Carlo Bugatti (dessiné par l’artiste italien en 1905), placé aux côtés d’une table basse E1027 d’Eileen Gray. Cette juxtaposition de deux styles si différents repousse les limites des codes classiques et démontre la créativité du réalisateur, soucieux de créer un contraste esthétique flagrant.

« Once upon a time in Hollywood », Quentin Tarantino, 2019

Grande table de bibliothèque, Pierre Jeanneret

Comment peut-on parler de cinématographie contemporaine sans mentionner l’enfant terrible d’Hollywood qu’est Quentin Tarantino ! Célèbre réalisateur de Pulp Fiction et Kill Bill, il sort en 2019 Once upon a time in Hollywood, son neuvième film, dédié à l’industrie du cinéma américain, qui se déroule dans le Hollywood des années 70. Riche de références aux Westerns et avec un jeu d’acteur impressionnant des deux protagonistes Leo Di Caprio et Brad Pitt, ce film oscille entre violence et comédie, film d’action et mélodrame, à la sauce Tarantinesque. Dans la scène faisant un clin d’œil à son autre chef-d’œuvre Inglorious Bastards, Di Caprio enflamme les Nazis pendant leur réunion sur une table éclairante de… Pierre Jeanneret ! Un choix de meuble assez inattendu, sachant que cette table a été dessinée dans les années 50 pour l’université de Chandigarh en Inde, bien après la Seconde Guerre Mondiale. Mais comme dans tous les films de Tarantino, l’humour, la caricature et la fiction se mélangent, et on se laisse porter par l’univers unique créé par le réalisateur.

Au-delà d’une narration enrichie par le Design, certains films sont un véritable régal visuel. Avec ou sans pièces emblématiques du design, ces films nous occupent, nous inspirent et nous font rêver. Comme affirmait la phrase culte d’André Barzin ouvrant la narration du Mépris de Jean Luc Godard (1963) « Le cinéma substitue à notre regard un monde qui s’accorde à nos désirs ».

Amateurs de cinéma ou de design, bonne séance à tous !

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